Sex love and Money : Quand le cinéma ivoirien ose, mais…

Il y avait de quoi espérer.
Un titre qui claque. Un synopsis sulfureux. Une bande annonce bien bandante. Un casting prometteur.
Avec Love, Sex and Money, Owell Brown semblait prêt à dynamiter les codes du cinéma ivoirien, à exposer sans fard une jeunesse prise entre sexe, désir, violence et désillusion. Mais très vite, la tension retombe. Et le film, pourtant riche de potentiel, s’effondre sous le poids de ses propres ambitions.
Que s’est-il passé ?
Un coup de poing… à moitié porté
Owell Brown mérite d’être salué.
Il brise des tabous, met la sexualité frontale au cœur du récit, assume un langage cru, parfois brutal. On est loin des romances tièdes et des drames convenus.
Le film ose.
Il aborde des thématiques majeures : chômage, sexe, drogues, blanchiment, santé mentale…
Tout est là pour dresser un tableau lucide, dérangeant, urgent.
Et l’épilogue, la missive inattendue de Rudy, une touche de finesse véritable.
Mais une fois passée l’audace du fond… vient la déception de la forme.
Sex. Love. Money.
Trois mots. Trois chocs. Mais le ciment mis entre eux tient à peine le tout.
Le film avance en fragments, comme un kaléidoscope mal maîtrisé. Des scènes surgissent, d’autres disparaissent, certains personnages ne servent à rien ou reviennent sans explication.
À l’image de cette séance de thérapie sexuelle collective, avec des gens nus qui n’ont visiblement rien à faire dans le même cadre narratif.
En fait le manche du balai, on se demande en qui il était vraiment… certains personnages semblaient bien l’avoir au fond… Je n’ai pas dit le nom de quelqu’un : passons !
Et puis le « Bai* se-moi ! Stp » hurlé par Diana Bouli n’était pas nécessaire, surtout que cette partie du film mettait l’accent sur le love, cette transition du personnage principal.
On ne sait plus s’il faut compatir, rire ou zapper.
Clin d’œil au doyen fortuné Akapko qui disparaît comme happé par la prière qu’il se proposait de faire pour aider Axel…
Au tonton maniaco-pervers, adepte des plans à 3 moins 1, tu m’arrêtes ça !
Et puis des personnages “formatés” dans un monde pourtant censé être sale, très sale.
Dans un univers aussi sombre, aussi chargé de tension, on s’attend à des personnages bruts, déchirés, ambigus.
Mais non.
Axel, le héros, censé incarner le génie torturé, semble constamment en dehors de ses propres démons.
À part son addiction au sexe qui est la partie la plus réussie du film { en tout cas, le gars bai*se beaucoup dedans hein } , on ne sent ni sa rage ( à part ce cri quand il est interrogé par nos deux agents ), ni sa douleur, ni sa folie.
Il reste lisse, presque scolaire.
Axel reste un « latté »…
si si !
Olivier Kissita est un excellent acteur, mais trop « choco » sur ce coup : Il n’y qu’à voir le contraste entre lui, Nooka qui joue son ami et Fargass Assandé qui joue son mentor.
Hassan, la “patronne mafieuse”, manque de chair. Reine de la castration, trop froide, trop figée, trop propre pour inspirer la peur. Rudy la dépeint. Juste ça. Sec ! Même si Mouna Ndiaye, garde son charisme et son charme habituel, son personnage ici est plat.
Et sa mort ? Expédiée, sans émotion, sans profondeur. Elle disparaît comme elle est venue : floue, sans empreinte.
Et son bras droit ? Entre trois répliques et trois grosses sapes pour tout le film : était-il vraiment utile ?
Le dernier acte du film frôle l’absurde.
Axel, meurtri, trahi, abîmé, finit par faire commerce avec l’homme qui a l’a brisé.
Oui, la logique du “survivre à tout prix” et le calibrage d’une fin rocambolesque peut s’entendre…Mais encore faut-il la construire, la rendre palpable, légitime.
Bref. Le film nous tend une claque… mais tend le bras court… trop court.
Et pourtant… il faut aller voir ce film.
Parce que peu de films ivoiriens ont osé autant.
Parce qu’il ouvre un débat. Parce qu’il dérange là où il faut.
Et parce que derrière ses failles, Love, Sex and Money est une œuvre brute, sincère, pleine de promesses pour un cinéma africain plus audacieux, plus cru, plus vrai.
Allez le voir et ne dites à personne que je vous ai dit ça !
Par Charles N’deffo,