Le Kenya censure un documentaire sur un couple homosexuel, le jugeant « blasphématoire »

Le Kenya censure un documentaire sur un couple homosexuel, le jugeant « blasphématoire »
Le Kenya censure un documentaire sur un couple homosexuel, le jugeant « blasphématoire »
Le Kenya censure un documentaire sur un couple homosexuel, le jugeant « blasphématoire »

« I am Samuel », du réalisateur Peter Murimi, raconte une histoire d’amour entre deux hommes vivant à Nairobi.

Les autorités kényanes ont interdit, jeudi 23 septembre, la projection et la diffusion d’un documentaire racontant l’histoire d’un couple gay, qualifiant le film « d’inacceptable et d’affront à la culture et à l’identité » de ce pays profondément chrétien qui criminalise l’homosexualité. I am Samuel, du réalisateur kényan Peter Murimi, raconte une histoire d’amour entre deux hommes vivant à Nairobi.

Le film a suscité la colère du Kenya Film Classification Board (KFCB), qui estime qu’il fait la promotion du « mariage gay comme un mode de vie acceptable ». Dans un communiqué annonçant l’interdiction du film, le KFCB estime que le documentaire « propage des valeurs qui sont en dissonance avec notre Constitution, nos valeurs culturelles et nos normes ». Pire, souligne Christopher Wambu, le patron du KFCB, le film montre ce couple simulant un mariage religieux, un acte qu’il qualifie de « blasphématoire ». Le KFCB interdit donc « de projeter, de distribuer, de posséder et de diffuser » le film sur le territoire kényan.

L’homosexualité est taboue dans la plupart des pays d’Afrique, où les homosexuels font souvent face à des discriminations, voire des persécutions. Au Kenya, de récentes tentatives de faire annuler les lois qui interdisent l’homosexualité, héritées de l’époque coloniale britannique, ont échoué. Les relations homosexuelles y restent un crime qui, selon la loi, peut entraîner une peine allant jusqu’à quatorze ans de prison, mais les procès sont rares.

Une interdiction « discriminatoire »

I am Samuel est le second film kényan à faire polémique sur ce thème ces dernières années. En 2018, Rafiki (« ami(e) », en swahili), de Wanuri Kahiu, une histoire d’amour lesbien qui fut le premier film kényan projeté au Festival de Cannes, avait également été interdit. Après une bataille judiciaire, Rafiki avait finalement été projeté pendant une courte période à Nairobi, dans des salles combles.

Peter Murimi avait affirmé, dans une interview à l’AFP en octobre 2020, s’attendre à ce que le documentaire ne soit pas bien accueilli par les censeurs kényans. Il décrit cependant son film comme « très nuancé, très équilibré, c’est l’histoire d’une famille qui lutte contre ce problème, avoir un enfant gay ». « Nous ferons juste de notre mieux et avec un peu de chance, les Kényans le verront », déclarait-il. Le documentaire, projeté dans plusieurs festivals et disponible à la location en ligne, a également reçu le soutien de Wanuri Kahiu. « La censure reflète le manque de confiance en elle d’une société », a écrit la réalisatrice sur Twitter après l’annonce de l’interdiction du film.

Human Rights Watch (HRW) a condamné cette interdiction « discriminatoire », qui viole selon l’ONG les droits des citoyens kényans. « Une fois encore, le gouvernement kényan a dénigré ses citoyens LGBT en interdisant un documentaire visant à humaniser un couple gay kényan ordinaire », a expliqué à l’AFP Neela Ghoshal, directrice adjointe de la division LGBT de HRW. « Le KFCB peut continuer de violer la liberté d’expression en réduisant au silence les voix homosexuelles kényanes, mais ne peut pas les faire disparaître », a-t-elle ajouté.

Sources : Le Monde avec AFP